Peut-on faire preuve d’insolence avec son patron sans commettre de faute ?

par Geoffrey LOPES avec AFP
Publié le 15 novembre 2023 à 14h30

Source : Sujet TF1 Info

L’insolence ou l’insistance envers un dirigeant d’entreprise ne sont pas considérées comme des abus de la liberté d’expression.

Insulter votre patron peut vous coûter cher. En face-à-face ou sur les réseaux sociaux, des injures vous exposent à une mise à pied conservatoire et à une sanction disciplinaire allant du simple avertissement au licenciement pour faute grave. "L'employeur est libre de la sanction qu'il prononce. Il a l’opportunité des poursuites disciplinaires et de l'échelle des sanctions", assure Me Eric Rocheblave, spécialiste en droit du travail. En revanche, insister envers son patron pour le faire changer d’avis ne justifie pas de sanction, affirme la Cour de cassation à propos de l’affaire suivante.

Un salarié est licencié après avoir harcelé son directeur pour obtenir des congés. Il n’y avait pas droit puisqu’ils ne correspondaient pas à ceux prévus par un accord d’entreprise. Sa direction lui reproche d’avoir insisté, par de nombreux messages irrespectueux, traitant son dirigeant d’égal à égal, voire en subordonné. "Je considère que l’incident est clos", écrit notamment ce salarié, prenant de haut le dirigeant, après avoir finalement obtenu ce qu’il réclamait.

Comportement pas abusif

La Cour de cassation fait annuler la sanction et donne raison au salarié. "Harceler son patron pour obtenir un avantage éventuellement indu, même en connaissance de cause, ou insister pour le faire changer d’avis, ou encore utiliser un ton polémique, irrespectueux, inadéquat au regard de la hiérarchie, ne sont pas des abus de la liberté d’expression qui justifieraient une sanction. Un licenciement est totalement nul si, parmi d'autres causes, il est fondé, même en partie, sur l’usage de la liberté d’expression", assurent les magistrats.

La Cour de cassation rappelle que l’abus de la liberté d’expression suppose l’emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs. "Ce comportement, pour déplacer, irrespectueux, impoli ou polémique qu’il soit, n’est pas abusif puisqu’il n’est ni injurieux, ni diffamatoire, ni même excessif", estiment les juges, sans définir clairement la teneur d’un propos excessif.

En janvier 2020, la Cour avait jugé que des remarques, ressenties comme désagréables par les autres, ne justifiaient pas pour autant une sanction.


Geoffrey LOPES avec AFP

Tout
TF1 Info